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Un virus à pédales bien meilleur que la Covid.

PROLOGUE


Le départ de la deuxième étape allait être donné dans quelques secondes, Gaston gonflait les pectoraux, levait un peu la tête, juste derrière Egan Bernal porteur du Maillot Jaune, vainqueur du prologue de la veille. Avec un peu de chance demain il serait en première page du journal l'Equipe,ça ferait honneur à son club landais, la JSL de Labouheyre.

Gaston n'était venu au cyclisme que tardivement à cause de son papa qui l'avait vacciné tout petit avec la pointe d'un crampon de 32 millimètres appartenant à Bala, dit "Monsieur Drop". Demi d'ouverture du club de l'Union Sportive Dacquoise, à vingt ans il pouvait prétendre accéder à l'équipe phare du club. C'est à cette époque qu'il rencontra une charmante personne prénommée Amandine. La belle mit un terme à sa carrière rugbystique qui s'arrêta prématurément.

Tombée à la naissance dans le chaudron magique du vélo, Amandine l'avait contaminé, Gaston contracta le virus de la petite reine, heureusement moins dangereux mais tout aussi contagieux que le coronavirus. Toute la famille de la jeune fille pratiquait le cyclisme.

Son père, Michel,ancien professionnel avait même fait le Tour de France. Il exploitait maintenant un magasin de cycles à Saint-Paul-Lès-Dax. Son frère, Thierry âgé de vingt-et-un ans semblait présenter de bonnes dispositions et évoluait déjà au sein du club du Stade Montois en première catégorie.

Très physique Gaston progressait rapidement et bien conseillé par Michel et Thierry il ne tarda pas à égaler les performances de ce dernier. Après deux ans de pratique il était connu, reconnu et redouté dans les pelotons amateurs. Remarqué par Marc Madiot il finit par décrocher un contrat professionnel au sein de l'équipe Groupama-FDJ. Ses plus grands supporters, Michel, Thierry et sa fiancée Amandine le suivaient de près, surtout Amandine.

A sa grande surprise, le 13 Mars 2021, son entraîneur lui apprenait qu'il était retenu pour le Tour de France. Il était aux anges. Le départ devait avoir lieu à Nice.

Il fait toujours beau dans les Alpes Maritimes mais chose étrange,le 26 juin au départ du prologue il pleuvait. Gaston souhaitait faire briller le maillot de son équipe et tenait à réaliser une performance sur ce chrono de six kilomètres. Il en était capable, certes il ne rivaliserait pas avec les meilleurs, Dennis, Evenepoël ou encore Pinot son coéquipier ou Bardet, toutefois il en était persuadé, son temps serait honorable.

Sur le plan incliné du départ, sous son casque profilé, dans sa bulle il écoutait battre son cœur, c'était maintenant à lui de jouer. Amandine et Michel l'attendaient sur la ligne, ils seraient fiers de lui. Bien échauffé sur son home-trainer il avait fait monter la patate à deux cents pulsations par minute, il transpirait à grosses gouttes. Pour justifier sa sélection il devait donner tout ce qu'il avait dans le ventre.

Le chronométreur annonça, la main tendue et ouverte, cinq, quatre, trois..., tout en refermant les doigts les uns après les autres. Gaston, debout sur les pédales, les muscles tendus, tirait déjà sur le guidon. Zéro ! Il s'élança en danseuse en appuyant comme un forcené sur les pédales de manière à mettre la machine en route. Il lui fallait bien deux à trois cents mètres pour lancer le moteur avant d'atteindre sa vitesse de croisière.

Il trouvait bizarre, voire étrange cette sensation, les pavés défilaient tout près de son visage, les organisateurs n'avaient pas dû placer les balustrades dans le bon sens. Il y avait un problème, le ciel était sur sa droite au lieu d'être au-dessus. Il pédalait dans la semoule, tournait les jambes comme un avion mais restait immobile la tête sur l'herbe et les pieds dans les glaïeuls. Les pieds dans les glaïeuls, il souriait comme....non, non ce n'était pas le « Dormeur du Val » mais bien Gaston, sur le rond-point, étendu dans le gazon, les pieds dans le massif de glaïeuls.

Trop tard, il l'avait vue trop tard cette P... de bande blanche à deux cents mètres du départ, juste dans le virage. Il avait voulu relancer et sa roue arrière avait chassé, il n'avait pas été en mesure de négocier le passage sur le rond-point. Terminé le Tour, terminé avant de commencer, les larmes lui montaient aux yeux.

Examiné sur place par le médecin du Tour il n'avait rien de cassé et Gaston put rejoindre le bus de son équipe sur sa machine qui n'avait pas été endommagée. Amandine et Michel l'attendaient, dépités, le Tour prenait fin pour le dossard 31 dès la première journée, un désastre et une déception énorme.

Le coach de l'équipe, un homme exceptionnel, Nicolas Portal vint vers lui, le sourire aux lèvres, détendu. Il n'avait pas l'air de prendre la mesure de la déception de son coureur. Abandonner après deux cents mètres de course, Gaston avait honte et son coach qui souriait, un comble.

- Alors Gaston, tu ne l'as pas vue cette bande blanche ? Tu es parti trop fort, mais c'est vrai que c'est un piège ce revêtement, surtout quand il pleut. Ce n'est pas si grave que ça, le prologue ne compte pas dans la course, simplement demain tu repartiras lanterne rouge, mais rien n'est perdu !

Gaston n'en revenait pas, rien n'aurait pu lui faire davantage de plaisir. Les compteurs étaient remis à zéro, la course n'avait pas encore commencé, c'était un gagneur Gaston, demain il serait le meilleur et ferait la Une du journal l'Equipe.

Effectivement, le lendemain sa chute spectaculaire passait en boucle sur toutes les chaînes télévisées, il avait réalisé un beau coup de pub, il était connu comme excellent cascadeur et avait un avenir dans les sports de glisse, voire dans le domaine de l'équitation qui demande un équilibre certain.

Tout au long des quatre mille kilomètres de ce cent septième Tour de France, remporté par Thibaut Pinot, Gaston s'illustra à plusieurs reprises et fit briller le maillot Groupama-FDJ.

Amandine et Michel n'étaient pas peu fiers lorsque Gaston arriva au sein du peloton le 20 juillet sur les Champs Élysées.

Parfois Nicolas, son coach raconte cette histoire au Vieux-Gaulois, au Petit Ramoneur, à l'Empereur d'Herentals, à Poupou, au Blaireau et même parfois lorsqu'il le croise au Grand Jacques.

Gaston c'était lui aussi un champion et du côté de Saint-Paul-Lès-Dax, connu comme le loup blanc dans son magasin de vélos.

Mais est-il nécessaire de préciser que, toute ressemblance avec des personnes existant ou ayant existé serait purement fortuite. Ah j'oubliais ! L'édition du Tour de France 2021 avait été judicieusement et sagement annulée pour cause de...Connerievirus, ou quelque chose dans ce style dont je ne me souviens pas.

Vive le vélo, c'est bon pour les bronches, la tête et la planète.

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